8 H 30 Le bug
Première projection d'Okja (lire ci-contre), dévoilé à une majorité de journalistes après des semaines de polémique entourant la présence de films estampillés Netflix en compétition officielle - la Fédération nationale des cinémas français (FNCF) a d'ailleurs boycotté les séances en ne réclamant pas son quota de places. On avait bien anticipé les quelques sifflets à l'apparition au générique du logo de Netflix, mais pas ce happening aussi dérisoire que lourd de signes et de sens (tout bon festival de cinéma est un lupanar sémiotique) : lorsque démarre ce film que la majorité de ses spectateurs sont voués à découvrir sur un tout petit écran 16/9 d'ordinateur ou de tablette, le format de l'image se retrouve démesurément allongé, trois fois plus large que le plus ample des scope, et les personnages ont la tête coupée. Tandis que durant cinq minutes la salle gronde, siffle, hulule ou applaudit par vagues avec cette componction qui fait l'honneur de la profession telle que représentée à Cannes, on comprendra qu'un cache obstruait le tiers supérieur de l'écran. L'organisation a émis quelques heures plus tard un communiqué stipulant que l'incident était «uniquement dû aux services techniques du Festival, qui présente ses excuses au réalisateur et à ses équipes, aux producteurs ainsi qu'aux spectateurs de la séance». Méfiant et au bord du complotisme, notre chroniqueur et reporter Fritz Lang von Püt n'a toujours pas balayé ses soupçons d'une intervention terroriste d'exploitants de salle radicalisés.
12 h 02 Chute libre
Alerte-push sur le biopic de trop : Jesse Eisenberg, dont la carrière pourrait donner lieu bientôt à un symposium sur le thème «votre agent vous veut du mal» va jouer le mime Marceau dans un biopic intitulé Résistance. Rappelons qu'il faisait déjà le magicien dans Insaisissable. La mère de Jesse était clown et il aurait goûté très tôt aux plaisirs enfarinés des pantomimes aphasiques de Bip («qui se cogne à la vie qui est à la fois un grand cirque et un grand mystère», on ne le dira jamais assez).
13 h 42 Le défilé
A la pire heure imaginable, celle où le festivalier affamé sort de sa deuxième projo et qu’il ne reste plus de socca à la cuisine d’Aqui, un défilé de 2CV multicolores choisit d’encombrer la rue d’Antibes avec à leur bord saluant par le toit une escouade de simili-gendarmes costumés de beige et une bonne sœur en cornette rappelant les pires heures du cinéma français. Ce qu’ils foutaient là, on n’en sait rien, mais ils étaient escortés par trois flics à moto qui, on imagine, ont trouvé là un bon moyen de sécuriser la Croisette.