Menu
Libération
Cannes 2018

«Climax» sous acide, arrière-goût amer

Violence. Les plans-séquences du nouveau Gaspar Noé impressionnent mais le film rate la cible.
Le long métrage ne surprendra pas les connaisseurs de Noé.
publié le 13 mai 2018 à 20h26

En février, des articles relataient le tournage d'un nouveau film par Gaspar Noé, alors encore titré Psyché, révélant qu'il y dirigeait une vingtaine de jeunes street-dancers dans un huis clos d'abord euphorique puis ensanglanté quand ils découvrent qu'ils ont été drogués à leur insu et que la folie paranoïaque les pousse à des comportements extrêmes. Apparement, le film était encore en finition à deux jours de la toute première projection à la Quinzaine des réalisateurs dimanche matin, pleine à craquer d'une audience pour bonne partie acquise à l'avance à ce trip tenu secret de l'auteur d'Irréversible et dont, en effet, aucune image n'avait fuité.

Rebaptisé Climax, le projet n'est pas de nature à vraiment dérouter pour qui suit le travail de Noé, tant il revient de manière obsessionnelle sur ces récits de chute libre, de dérèglements de la perception et de désorientation suicidaire. La loi d'entropie de son cinéma a toujours été celle du vortex. Dans Enter the Void et Love 3D, le récit est tenu dans son ébriété stroboscopique par la focale d'un monologue intérieur, or, ici, l'enfermement choral l'oblige à circuler d'un danseur à l'autre dans de virtuoses plans-séquence. Réalisé plus vite, avec moins de moyens, Climax laisse éprouver les limites d'un cinéma qui fonctionne à l'excitation sensorielle et à l'ivresse formelle du prototype technique. On attend en vain ce franchissement de frontière que la première séquence de danse laisse augurer, un ballet de krump et de voguing un peu inouï sur une version boostée du Supernature de Cerrone. Promesse que le film ne peut tenir, offrant à la place la scénographie hystérisée d'une panique sous acide dont chaque étape semble une tentative de violence augmentée des Anges de la téléréalité, avec les mêmes pénibles états d'âme et hormones mal gérées de bimbos en furie et de machos en manque.