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Libération
Critique

«Indianara», activiste en état de trans

Un portrait inspirant d’une militante de la cause LGBT+ dans un Brésil pré-Bolsonaro à l’homophobie croissante.
Le film suit la militante les deux années avant l'élection de Bolsonaro. (Photo New Story)
publié le 25 novembre 2019 à 18h51

Indianara traîne une longue vie tumultueuse dans son sillage tempétueux. Elle quitte sa famille à 12 ans, change de sexe à 16, se prostitue, notamment à Paris, où, hébergeant des collègues, elle est arrêtée et condamnée pour proxénétisme aggravé, passant deux ans à Fleury-Mérogis avant d’être expulsée vers le Brésil avec interdiction de revenir. C’est à la faveur de ce come-back brésilien qu’elle devient une figure de l’activisme LGBT+, créant à Rio un lieu d’accueil, Casa Nem, où se réfugient jeunes gays expulsés par leur famille, trans malmenés par les flics ou la mafia…

Indianara est d’autant plus virulente qu’elle a elle-même subi des agressions régulières, tout particulièrement de la police brésilienne, pas connue pour son sens de la mesure. Elle a reçu des jets d’ammoniaque au visage, été attachée à un poteau et menacée d’un revolver sur la tempe le temps d’une séance de roulette russe où elle a bien cru mourir.

En 2016, elle parvient à se faire élire comme suppléante au conseil municipal de Rio sous l’étiquette du Parti socialisme et liberté (PSOL), qui finira par l’exclure en l’accusant d’exploitation sexuelle de mineurs. Elle a cependant continué à être soutenue par l’aile LGBT+ du PSOL, lequel jugeait à l’évidence Indianara trop bruyante et radicale dans ses prises de parole, ce que montre d’ailleurs le docu que lui consacrent Aude Chevalier-Beaumel et Marcelo Barbosa, qui l’ont suivie pendant deux ans, entre l’expulsion de la Casa Nem et l’élection de Jair Bolsonaro.

On peut imaginer que la situation de grande précarité des protagonistes du film ne s'est pas améliorée depuis le triomphe du populiste imbécile, qui déclarait en avril : «Le Brésil ne peut pas être le pays de tous les gays du monde. Nous avons des familles.»