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Libération

7 septembre «Joker», du rire aux armes

publié le 27 décembre 2019 à 17h06

L'ombre de Victor Hugo aura plané sur l'année 2019 : l'incendie de Notre-Dame de Paris, bien sûr, puis le succès des Misérables de Ladj Ly, le roman ayant été partiellement écrit à Montfermeil, sont les exemples les plus évidents, mais il faut leur ajouter la figure du Joker, variation sur l'Homme qui rit : «Il ne souriait pas, nous l'avons dit, mais il riait ; parfois, fréquemment même, d'un rire amer. Il y a du consentement dans le sourire, tandis que le rire est souvent un refus.»

Dans le film de Todd Philips, lion d’or à Venise, plus le personnage souffre, plus il rit. Hilarité nerveuse, fusant dérythmée en hoquets inquiétants et imbéciles, qui est le germe de plus grands déséquilibres personnels dans une ville (New York / Gotham), dont le corps exaspéré est lui aussi secoué par les spasmes de l’insurrection. Le film a fait polémique aux Etats-Unis pour incitation à la violence - le réprouvé, n’en pouvant plus, se venge et fait taire dans le sang les ricanements de ceux qui l’avaient cru faible et même pas drôle - et son nihilisme fardé a séduit, voire fasciné les foules, prêtes à s’identifier en masse au personnage interprété avec une inquiétante virtuosité jusqu’au-boutiste par Joaquin Phoenix, candidat évident pour les prochains oscars.