C'est acquis, nous sommes en train de nous tuer à petit feu. Loin de provoquer une panique constructive, ce constat donne surtout lieu, depuis des décennies, à un mélange de fatalisme et d'inutile mauvaise conscience ne produisant pas d'effets très concluants. La menace sur la planète, diffuse au quotidien, est désormais si immense que le sentiment d'impuissance le dispute à l'irresponsabilité. C'est à cette menace, circonscrite de manière bien plus précise cette fois que dans l'extraordinaire Safe (1995) - où déjà le cinéaste Todd Haynes s'y intéressait -, que Dark Waters se frotte.
Le propos et la forme sont cette fois bien plus terre à terre - il s'agit d'un film-dossier, là où le premier déployait une fine étude psychologique sur fond d'inquiétant théâtre high class - mais peut-être est-ce là le film que nous méritons, ou dont notre époque a en tout cas besoin. Dark Waters met en scène un Goliath facilement identifiable, pour peu qu'on veuille bien s'en donner la peine, aux prises avec un fragile David qui le mitraille d'attaques aussi désespérées que répétées, et l'on peut lire dans ce beau film une injonction à l'action, quand bien même nécessite-t-elle des ressorts quasi surhumains d'intellige