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Libération
Le portrait

Eric Barbier, le cinéma au temps du corona

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Empathique et gouailleur, le réalisateur voit la sortie de son nouveau film, «Petit Pays» d’après Gaël Faye, repoussée à la fin août.
(Photo Audoin Desforges pour "Libération")
par Karine Tuil, Photo Audoin Desforges pour "Libération"
publié le 18 mars 2020 à 19h31

Dans le texte, ça donnerait : c'est l'histoire d'un mec qui kiffe le cinéma et qui déconne tout le temps pour ne pas avoir à jacter sur lui. Eric Barbier, c'est d'abord une gouaille unique, mélange d'argot et de langage parlé, cru, porté par un débit rapide comme une mitraillette, et l'on se demande, en l'écoutant, si ce n'est pas lui qui a inspiré le personnage d'Hippo dans Un monde sans pitié d'Eric Rochant : un type tendre, rageur, intègre, écorché vif qui, à vos questions, répond «Putain ! c'est la police !» en lançant son portable dans votre direction.

On sent que ça ne va pas être facile de l'approcher, il y a quelque chose d'un peu sauvage chez lui, la méfiance de ceux qui ont été mordus jusqu'au sang et n'osent plus tendre la main de peur qu'on la leur déchiquette. L'enfance est en apparence tranquille, dans les années 60, au cœur du petit village de Brignoles, auprès de parents instituteurs, communistes, cinéphiles. Les week-ends, il les passe enfermé dans des salles de cinéma à mater des films qui font marrer, pleurer. Il sort «traumatisé» du Passager de la pluie, de René Clément : l'histoire d'un viol. «J'avais le sentiment que la vie des adultes était affreuse.» A 13 ans, il décide avec ses copains d'aller voir Emmanuelle de Just Jaeckin. L'affaire est rodée ; un ami plus âgé se charge d'acheter les places : «On n'avait pas mesuré que c'était un film intello et quand on est entrés dans la salle, on a vu tou