A la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique, John Sayles a choisi son camp: il est évidemment le frère d’armes des Mexicains; avec les «dos mouillés» (par le Rio Grande) plutôt qu’avec les adorateurs du souvenir d’Alamo. A la frontière qui sépare Hollywood des productions indépendantes, il n’a pas mis longtemps, non plus, à se trouver une place: John Sayles, 45 ans, natif de l’Etat de New York, est aujourd’hui considéré comme l’un des pères fondateurs du cinéma indépendant. Mais pour ce qui est de raconter des histoires, John Sayles est un navigateur qui aime à passer de l’écriture à la mise en scène.
Dans l’univers strictement ordonné du cinéma américain où chacun doit occuper sa place et s’y tenir, ce cinéaste singulier se joue de toutes les frontières bien gardées de la morale, du star-system, du politiquement correct, et de la reconnaissance par l’argent. «Que les choses soient claires, je ne suis pas en guerre contre Hollywood, simplement mes idées ne sont pas assez commerciales, et quand on me fait des propositions, je les trouve trop commerciales. Parfois, j’utilise le système pour gagner ma vie en participant à l’écriture de scénarios pour des grosses productions telles Apollo 13. Je suis d’ailleurs en train d’écrire pour Sydney Pollack et James Cameron; ça me permet ensuite d’investir dans mes films», explique en souriant ce géant calme, alors que, derrière lui, passe la silhouette burinée de Kris Kristofferson, l’un des principaux interprètes de