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Libération
Samba

Le rêve percutant de Carlinhos Brown

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Le voyage intérieur d’un Brésilien lancé comme le messie des tambours.
publié le 4 juin 1996 à 7h25

Devant nous dort une lagune où glisse une dune blanche, endroit peuplé de fantômes et d’oiseaux. Couché sur le sable, Carlinhos Brown contemple les palmiers qui bataillent contre le ciel. «Beleza ! C’est de beauté dont nous avons besoin. Pas d’argent…»

Carlinhos est un aristocrate du ghetto, pétri de la distinction et de l’économie de la rue. Les millions de ses droits d’auteur (pour d’autres) n’ont pas affecté la silhouette fil de fer du plus célèbre des percussionnistes brésiliens, âgé de 27 ans. On s’affaire à la sortie de son premier album, lui rêve. Star, Carlinhos Brown l’était de naissance. Lorsqu’il se décide à sortir un album, c’est en France. Alfagamabetizado n’en est pas moins un album événementiel, ce qu’on en escompte est démesuré.

Depuis la percée du groupe Olodum dans les années 80, le monde «world» savait qu’au Brésil était en train de naître une musique. Tandis qu’à New York les sorciers techno se cloîtraient dans les studios, à Bahia la mode était aux armées de percussionnistes, les «blocs afro».

Dans les défilés de carnaval, le «trio eletrico», camions-scène à la mode de Rio, semait toujours la terreur sonore, mais d’autres formations trouvaient la puissance dans le nombre, tambourinant à cent, deux cents, mille. La sueur, le plaisir, l’humain reprenaient le dessus. Dans la foulée d’Ilé Ayé et d’Olodum naissaient des dizaines de groupes ; on renversait les fûts pour en tirer d’autres sons, à mains nues, sans baguettes, on e