Pierre Bergé, à l'époque où il pilotait l'Opéra de Paris, projetait
d'installer William Christie comme maître musical du palais Garnier, en figure symétrique de Myung Whun Chung à l'Opéra-Bastille. L'ouverture de cette saison 96-97 dans la salle dorée confirme que cette donne était plausible. L'intention n'est pas de donner raison à l'ancien patron des lieux, mais plutôt de renouveler, avec Hippolythe et Aricie, de Rameau, le succès étonnant d'Athis. Cette tragédie lyrique de Lully, réalisée par Christie et le metteur en scène Jean-Marie Villégier, avait été donnée, il y a dix ans, à l'Opéra de Paris, puis reprise, tournée, consacrant les progrès de la musique ancienne dans les goûts du public et, d'une certaine manière, son institutionnalisation.
Reproduire cette surprise était cependant impossible. Déjà, lorsque les deux hommes avaient monté Médée de Marc-Antoine Charpentier à l'Opéra de Strasbourg il y a trois ans, il s'agissait d'une confirmation, rehaussée par l'impact dramatique de l'ouvrage. Cette fois, la distance est encore plus grande. Car si dix ans se sont écoulés, ce sont soixante ans qui séparent, à l'échelle de la tragédie lyrique, Athis d'Hippolyte et Aricie. Le spectateur s'inquiète d'un plaisir perdu. Car Rameau, pour mieux relever ses audaces musicales, a choisi une trame narrative des plus attardées.
A la mécanique rutilante des mots de Quinault le librettiste de Lully , à leur géométrie enivrante, succèdent ici des rimes besogneuses et noyées par une mus