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Libération
Critique

«When We Were Kings»

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A Kinshasa en 1974, pour son «combat du siècle» face à Foreman, Mohammed Ali, figure de proue du «Black Power» funk et tchatcheur survolté, met tout le monde KO: un modèle de documentaire, signé Leon Gast. Ali uppercute l'écran.
publié le 23 avril 1997 à 1h41

When We Were Kings est un film qui aurait pu ne jamais se faire. Il nous arrive vingt-trois ans après l'heure de son tournage comme si de rien n'était. Les hésitations, bifurcations, embrouilles et coups du sort qui ont accompagné sa genèse ne rendent que plus direct ce documentaire en liberté qui vient de décrocher l'oscar du genre et prend dans sa mire le Mohammed Ali d'une généreuse époque.

Le boxeur, débarqué en 1974 en Afrique pour le «combat du siècle» contre George Foreman, est devenu par hasard le coeur d'un film dont il aurait dû fréquenter la périphérie. C'est comme s'il en avait pris les commandes. Il se joue de la caméra comme s'il se tenait entre les cordes, avec un sens très sûr de l'esquive et du harcèlement, des allers-retours saisissants entre le calcul et l'improvisation, une puissance magnétique de démolisseur qui se régale du moindre espace et pose méthodiquement, comme à chaque round de sa carrière, le sens d'un combat au sens large. «J'ai une mission», souffle Ali à l'équipe qui le suit pas à pas dans sa retraite de Kinshasa où il est accueilli en prophète. «Au diable l'Amérique! Après 4 000 ans d'esclavage, je rentre chez moi, je suis de retour en Afrique.» «Je vais combattre pour mon peuple, lance-t-il aussi. Pour ceux qui dorment sur le pavé, pour les camés, pour les prostitués"» Et puisqu'il ne serait pas Ali s'il était d'un bloc, il retourne les questions comme un gant: «Quel message pour les enfants américains?»