Michel Vinaver avait publié deux romans lorsqu'il entra comme cadre
administratif chez Gillette, société où il ferait sa carrière. C'était en 1953. Une de ses premières missions consista à tenter de faire abolir un décret interdisant la pratique des permanentes à domicile, vu l'éventuelle dangerosité des composants chimiques pour le cuir chevelu. Chargé d'organiser le lobbying auprès des corps constitués et autres comités d'hygiène ou journaux professionnels, Vinaver constata de visu l'imbrication de divers plans de la vie publique, observa l'insolite sinon le disparate dans l'agenda des hommes politiques.
En son temps explosive. L'été 1955, il suivrait à Annecy les répétitions d'Ubu Roi, lors d'un stage d'amateurs dirigé par Gabriel Monnet. Encouragé par ce dernier il en vint à écrire sa première pièce: les Coréens. Cette odyssée d'un soldat du contingent français en Extrême-Orient montée fin 1956 par Roger Planchon, fut reprise d'emblée par Jean-Marie Serreau, et louée par Roland Barthes, puis interdite par le ministère de la Jeunesse et des Sports. Dans le même élan, l'auteur allait composer les Huissiers, s'inspirant à nouveau de l'actualité, cette fois la guerre d'Algérie. Trempée dans l'ironie, la pièce à niveaux multiples, qui aurait pu sur le moment être explosive, attendrait vingt-trois ans avant d'être créée.
Elle est donnée de nouveau aujourd'hui par Alain Françon. Quarante ans plus tard, certains spectateurs peuvent avoir la mémoire vive du massacre de Melouza le