En 1995, Judith Cahen créait une mini-sensation dans le Landerneau
cinéphile avec sa Croisade d'Anne Buridan, qui entendait renouer avec l'esprit libertaire et théorique des films-labos post-68 de Godard ou les travaux pince-sans-rire d'un Luc Moullet: une jeune Parisienne aux sourcils froncés agitait le bocal des questions irrésolues du désir, de la communauté, de l'action politique, etc. Dans La révolution sexuelle n'a pas eu lieu, même topo: Anne Buridan a ses nerfs, des vapeurs, elle veut prendre du recul pour «ranger sa tête». A Radio Ultime, le collectif libertaire qu'elle tanne un peu, à force, Anne a ses ami(e)s et quelques ex-amants. Ailleurs, ses parents, gauchistes embourgeoisés, sont à la coule, maman psy en cheveux, papa gâteau qui défile hilare à la «fierté homo». Chez elle, Anne se branche des électrodes pour quelques trips virtuels qui lui rincent le cervelet et la rendent à moitié folle. Elle clique sur «Corps», «Politique», visualise les concepts en saynètes déshabillées. La camisole chimique n'est plus très loin, n'était l'intervention de copains qui la sifflent pour une balade en camionnette peace and love. C'est vraiment super.
Congélation. L'indigence intellectuelle et formelle qui traverse les deux heures du film met le spectateur dans des états successifs de garde baissée (le côté sympa, l'amateurisme comme principe) et de haut-le-coeur (la culture exhibée comme cache-sexe ou cache-misère). Ici, on cite Deleuze sans dire son nom mais tout, à l'image l