Pour les amateurs de jazz, Bobby Troup était un crooner agressif,
pres-que un néo-bopper à la Ben Sidran, dont les albums de swing délicat méritent réédition. Pour les amateurs de mélodie, c'est l'auteur de dizaines de standards, tels Lemon Tree, Tell Me You're Home, Do Re Mi, You're Looking At Me, Hungry Man, You're In Love, I'm With You, The Three Bears, Heidi, Snooty Little Cutie, Baby Baby, All The Time, Girl Talk, souvent repris par les grands vocalistes de variété ou de jazz. Pour les amateurs de musique d'ambiance (easy listening), c'est le producteur sensuel de Cry Me A River et autres tubes de la pulpeuse Julie London. Pour les cinéphiles, c'est le musicien acide de l'Homme de l'Ouest, chef-d'oeuvre tardif d'Anthony Mann. Pour les amateurs de shows télé, c'est celui qui animait avec beaucoup d'élégance et de discrétion la série Stars of jazz. Pour les amateurs de feuilletons télé, c'est un chaleureux second rôle, surtout connu pour son personnage de neurochirurgien dans la série Emergency. Pour les rockers, enfin, Bobby Troup est la signature cryptique de Route 66, le succès planétaire de Chuck Berry, des jeunes Rolling Stones, Them ou Depeche Mode. Un vieux gentleman qui n'aurait jamais pensé que sa chanson, susurrée en 1946 par Nat King Cole et son trio teenage, allait déplacer les «frontières» du rock blanc.
Attachant. «Now, you go through St Looey / Joplin, Missouri / And Oklahoma City looks mighty pretty», les paroles de ce Route 66 sonnent toujours aussi juvéni