Weimar envoyée spéciale
Une grande trouée à travers la forêt: Weimar, où se joue actuellement Tchevengour mis en scène par Lev Dodine, célèbre son titre de capitale européenne de la culture en commençant par quelques travaux de déboisement. Juste à la sortie de la ville, une longue laie a été défrichée, partant du château d'Ettersburg, où la duchesse Amalia tenait salon littéraire au XVIIIe, pour aboutir" au camp de Buchenwald, où près de 250 000 déportés furent détenus. Le raccourci est saisissant: d'un côté, la ville de Goethe et de Schiller, berceau du classicisme allemand; de l'autre, l'anéantissement de toute culture par les nazis.
Dernière ville du siècle à porter ce titre de capitale européenne de la culture, Weimar a construit tout son programme autour de ce double héritage contradictoire et de la question du temps: «Que reste-t-il après 1999?» Les passerelles entre les époques seront partout dans la ville: les «mauvais objets» délibérément placés «aux mauvais endroits». Des dessins de Goethe exposés dans le camp de Buchenwald. Des copies de meubles fabriqués par les déportés dans le musée Schiller. Même le pavillon de Goethe, au bord de l'Illm, sera soumis à l'impertinente interrogation du temps. Du printemps à l'automne, cet illustre petit pavillon sera confronté à deux copies de lui-même: un pavillon virtuel, reconstitué par ordinateur, et une reproduction à l'identique où les visiteurs pourront déambuler et même prendre en main tous les objets exposés puisque ce n