Miguel Torres est metteur en scène. A 47 ans, il codirige (avec
l'Argentin Jorge Eines) la salle Ensayo 100, l'une des premières à avoir émergé sur la scène alternative madrilène.
«D'abord, je n'aime pas trop le terme "alternatif. Ça nous range dans une catégorie de marginaux. On fait simplement du théâtre, à la seule différence que les moyens sont plus limités et les espaces réduits. C'est vrai qu'on a tous été marqués par le langage de Beckett; et, lorsque l'on monte les auteurs classiques comme Shakespeare, Calderon de la Barca, Lope de Vega, on le fait de façon originale; on travaille sur les silences, on casse la linéarité. Dans les salles officielles, tout ça est fait de façon hiératique, grandiloquente. En Espagne, on en est resté très longtemps à un théâtre decorado, fondé sur le décorum et platement naturaliste. J'ai dû me battre pour gagner ma liberté de dramaturge. Je me souviens qu'à l'époque de Franco on faisait des pièces avec trois bouts de bois. Plus tard, avec une troupe de sept membres, on voulait monter la Revolucion du Vénézuélien Isaac Chocron. Personne n'en voulait. Alors on a ouvert une salle avec trente places. On souhaitait imposer notre travail créatif et le rendre rentable. Moi, pour vivre, le reste du temps, j'étais camionneur. Aujourd'hui, je m'en sors en donnant des cours de chant et d'alto.
Mon moteur? La passion. Le théâtre, je ne l'entends que tout près de la respiration et de la sueur de l'acteur. Il faut presque pouvoir le toucher. J'en ai pa