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Critique

Le son persan d'Abed Azrié Abed Azrié.

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WORLD. Le chanteur syrien s'est emparé de certains poèmes de l'Iranien Omar Khayyam.
publié le 31 mars 1999 à 0h21

Avec une belle impertinence, Abed Azrié, Syrien de naissance et Montmartrois d'adoption, consacre un album à quelques poèmes d'Omar Khayyam. La forme en est inclassable, aria arabe moderne pour une cuite métaphysique: Azrié chante un persan traduit en arabe et soumet un quatuor à cordes à la rythmique traditionnelle arabe, tandis que l'accordéon se déploie telle une caravane.

Révélé en Europe par la traduction de l'Irlandais Fitzerald en 1859, influence de la poésie postromantique, cité (dans ses livres et ses films) par Guy Debord, Khayyam aurait été, selon un lieu commun, inconnu en Iran avant que l'Occident ne s'en entiche. En réalité, il y était connu comme le mal. A peine un siècle après sa mort, vers 1248, Ali al-Qifti, un compilateur bigot, tempêtait: «Le fond de ses vers se compose de serpents venimeux pour la loi divine, et leur enchaînement mène à la perdition.» On pense à notre curé Meslier, dont le traité d'athéisme ne fut publié que deux siècles après sa mort, en Belgique.

Fameux algébriste. Natif de Nishâpur (vers 1040-1050), dans le Khorassan iranien, d'une famille d'origine arabe, Khayyam passa son enfance dans une ville qu'en 1038 le Turc Toghril Bey avait saccagée. La compagnie des ruines, le récit des horreurs du sac auraient ancré en lui le sentiment de la vanité humaine.

Comme les Renaissance men qu'il annonce, Omar Khayyam fut éclectique. Il connut la gloire comme algébriste ­ en 1853, on traduit en français l'un de ses traités sur les équations à trois in