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Libération
Critique

Takeshi Kitano filme en virtuose la chute enivrante d'un jeune yakusa. De la violence vue comme un des beaux-arts Jugatsu (ou Boiling Point) de Takeshi Kitano (1990), avec Masahiko Ono, Minoru Iizuka, Bengal, «Beat Takeshi»"" Durée: 1 h 36.

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publié le 14 avril 1999 à 0h43

Egalement connu sous le nom de Boiling Point, Jugatsu est le

deuxième film de Takeshi Kitano. Selon toute vraisemblance, c'est un film rêvé, tout entier déployé entre deux parenthèses, dans l'espace imaginaire d'un personnage engagé dans la plus intime cérémonie puisque c'est par le gros plan du visage d'un homme déféquant que Jugatsu s'ouvre et se conclut" Dans l'intervalle, le jeune Masaki, ce penseur assis, aura conçu, construit et habité une fiction sidérante mais taillée à ses propres mesures: asthénique et hébétée à ses débuts, puis perverse et ambiguë, et finalement déchaînée, implacable, incandescente.

A travers Masaki, l'objet filmé par Kitano est limpide: c'est de toute une certaine jeunesse japonaise et mélancolique qu'il est question dans Jugatsu, une jeunesse écartelée entre les codes d'un contexte Happy Days (culture américaine des terrains de base-ball, cafétérias et stations-service) et ceux de la tradition yakusa locale. Le sujet du cinéaste, en revanche, c'est la violence. Comme limite, d'abord, mais aussi comme force libératrice, énergie, mouvement: la violence comme matière plastique. Ainsi, s'il fricote souvent avec des effets de frime lynchiens, Kitano s'acquitte d'abord d'un véritable travail incident à la marge de son histoire: la décomposition des formes de la violence, dans son rapport au sport (étude du swing de la batte, puis de la frappe de la balle), aux véhicules (impeccable succession d'accidents de la route, statiques d'abord, dynamiques ensuit