On sait que Dieu, dans son infini bordel, inventa tout à l'envers.
D'abord l'homme, ensuite la femme, alors que depuis pas mal de millénaires l'éternel retour des enfants s'obstine à lui donner tort: jusqu'à nouvel ordre, les hommes procèdent des femmes et non l'inverse. Avec Tout sur ma mère (Todo Sobre Mi Madre), Pedro Almodovar, testamentaire au sens biblique, a filmé son origine du monde et corrigé l'erreur (lire aussi page 30). «Ma mère» comme on disait «ma mère, la Terre» dans la mythologie antique. Tout sur ma mère, c'est-à-dire tout sur les femmes, qu'elles soient mère en effet, mais aussi fille et enfant, soeur et bonne soeur, pute et sainte, travelo et transsexuelle, voire toutes ces figures à la fois. Ce qui pourrait paraître lourd à porter pour un seul cinéaste.
Madones allumées. Pour transcender ce fardeau en baluchon léger, Almodovar a eu une idée simple, une idée de cinéma. Tout sur ma mère est une gigantesque cathédrale dévolue au culte d'un être suprêmement cinématographique: l'actrice. Certes, les belles éternelles, comme Bette Davis et Romy Schneider, nommées dans la dédicace finale, mais surtout les grandes vivantes de son film qui doivent toutes être citées à l'ordre du mérite cinématographique: Cecilia Roth, Marisa Paredes, Candela Pena, Penelope Cruz, Antonia San Juan, Rosa Maria Sarda et Toni Canto, garçon-fille qui joue Lola. Mais si dévotion il y a, elle ne confine pas à la bigoterie.
Cette église saturée de madones allumées est surtout une crypte paï