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Libération

Sylvia Sidney lâche le drame social. L'actrice, chez Fritz Lang entre autres, avait 89 ans.

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publié le 5 juillet 1999 à 23h51

Pour les jeunes et fans de Tim Burton elle était sûrement la vieille

clopeuse de Beetlejuice, pour les Américains celle qui il y a encore un an jouait toujours dans le feuilleton Fantasy island, mais pour le reste du monde elle restera associée aux drames sociaux de la Grande Dépression: les grands yeux écarquillés, la bouche gonflée plus que pulpeuse, la diction plus distinctive que distinguée. Petite, délicate, elle était ronde, avec les chevilles épaisses, mais c'est son visage qu'on n'oubliera jamais, celui qui pouvait trahir le bonheur fragile mais surtout regarder les pires horreurs. On a peine à imaginer les trois premiers films américains de Fritz Lang sans elle: «Il y a dans Furie, écrit l'historien David Thomson, des gros plans de Sidney en train de regarder brûler Spencer Tracy dans sa prison qui égalent Lillian Gish dans le bouleversant.»

Sylvia Sidney est morte jeudi à Manhattan d'un cancer de la gorge. Elle avait 89 ans. Née Sophia Kossow d'une famille d'immigrants russes du Bronx, Sidney dut prendre des cours d'élocution pour un bégaiement prononcé; cela l'amena très tôt à faire du théâtre. A Hollywood dès 1929, elle devint star en 1931 en deux films seulement, une Tragédie américaine (Von Sternberg, d'après Dreiser), et l'infiniment meilleur City Streets (le Carrefour de la ville), où elle arrivait à peine au sternum de Gary Cooper. Ce film de Mamoulian était écrit par Dashiell Hammett, et plus qu'un autre définit le genre de rôles dont Sidney se fera une spéci