Les spectacles d'Emilie Valantin sont de ces moments précieux que
l'on guette avec impatience et dont on ressort toujours heureux. Parce que les petits êtres de bois, de papier, ou même de glace, qu'elle façonne dans l'atelier du Théâtre du Fust à Montélimar, accomplissent leurs gestes minuscules avec une grâce infinie. Et surtout parce qu'ils offrent un écho subtil aux textes choisis par un metteur en scène qui se distingue par sa grande intelligence de lecture; avec une prédilection pour les fragments métaphysiques où le burlesque le dispute au désespéré. Ici, c'est la teneur de l'oeuvre littéraire qui détermine la forme et le matériau empruntés pour donner corps aux créatures. Il y a vraiment dans cet artisanat de la scène, loin des mièvreries pour sorties scolaires, un avant et un après Emilie Valantin.
Dans la chapelle des Pénitents blancs à Avignon, ce sont d'abord des acteurs de chair et d'os qui foulent le plateau transformé en bateau pour nous embarquer dans l'atmosphère du Buenos Aires des années 30, celui de Roberto Arlt. Ecrivain de la ville qui fit oeuvre de l'exploration sociale, tandis qu'il gagnait sa vie comme chroniqueur pour les colonnes du journal populaire El Mundo.
Envies d'île déserte. C'est donc dans une salle de rédaction que démarre le spectacle où une poignée de petits bonshommes s'acharnent vaillamment sur leurs machines à écrire pour contenter le tout-puissant chef qui, derrière son pupitre, joue du chantage au renvoi. «Le port me rend mélancolique