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Libération
Analyse

Techno et fin du monde. Traversée de l'univers manga en six étapes.Perfect Blue de Satoshi Kon, film d'animation japonais. 1h21.

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publié le 8 septembre 1999 à 0h34

Vitesse

Prendre le futur de vitesse. Voilà ce que veut le manga, terme qui, en japonais, signifie juste «bande dessinée». Ce qui, question qualité, induit un flot périssable de médiocrités contre une bande sidérante. ça n'a pas d'importance, bientôt les manga finiront par ressembler en masse à cet idéal futuriste croisé au détour de Ghost in the shell, Akira ou Perfect Blue. Car il faut bien admettre qu'aujourd'hui dans la psyché de notre Occident réducteur, le manga a gagné une connotation technoïde. On l'imagine sexuel, métallique, chaotique, épileptique ou cyber. On attend de lui une lecture fardée de notre futur immédiat. Il nous exagère (toute cette mythologie de fin de race, d'une humanité à vau-l'eau"). C'est un signe qui nous empire. Il est noir comme une nuit de néons en extinction, blanc comme un deuil japonais. Le manga est terminal, depuis même son trait incisif, cette nervure qui évoque un Hokusaï from hell. Il se déplace avec une drôle de vitesse morte, un mouvement suspendu que Serge Daney avait décrit en 1982 comme l'affrontement d'une information toujours plus rapide et d'une communication lente. Le manga est statique mais travaillé d'impulsions. C'est dire si son immobilisme et sa raideur nous hurlent à quel point l'information dans le ventre de la machine nous est devenue inaccessible. Certains manga parmi les plus raffinés ont visiblement appris à raconter une histoire sur le décalque d'un jeu vidéo. Vous luttez (toujours trop lent) contre le récit et sa c