Au terme de la compétition deauvillaise, Fiona, le dernier des dix
films présentés, a violemment éclipsé les autres. Compte tenu du faiblard paysage alentour, la tâche n'était pas trop difficile. Ce qui était difficile pour Amos Kollek, c'était de rééditer avec Fiona l'effet coup de poing dans la gueule produit l'an passé sur ces mêmes planches par Sue. Il réédite en effet, mais sans se répéter.
Sans doute le cinéaste bénéficie-t-il aussi de cet avantage paradoxal: en présentant ses films nus, blafards, pessimistes et pouilleux dans le cadre marbré et rutilant de l'opulente Deauville, il obtient un effet de contraste idéal et met toutes les chances de se faire entendre de son côté.
Antihollywoodien. C'est parce qu'il est déplacé que Kollek a ici toute sa place, mais c'est aussi à un autre titre: avec, dans un autre registre, Being John Malkovich de Spike Jonze, Fiona est le seul film américain présenté à Deauville qui témoigne d'un cinéma en résonance avec les autres cinémas du monde, et, singulièrement, le cinéma européen. Car si le radicalisme antihollywoodien fonde sans doute le cinéma de Kollek, il ne s'en contente pas: expérience aux limites les plus coupantes du réalisme, travail au corps à corps d'une caméra à l'épaule presque humaine quoique impalpable, mélange égalitaire d'acteurs professionnels et d'autres sans brevet" c'est avec les questions les plus vives du cinéma moderne, telles qu'elles ont notamment explosé lors du dernier palmarès cannois, que dialogue Fiona.
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