Jean-Pierre et Luc Dardenne racontent à l'unisson comment le
personnage Rosetta est devenu un film. «Au départ, on avait l'idée de cette fille, jeune, (lire Libération du 7 septembre) qui est dehors face à une forteresse et qui, en se battant pour entrer à l'intérieur, devient elle-même une forteresse. Emmurée dans son obsession. C'était la vision d'un personnage de dos. Dans le scénario déjà: «La nuque, le dos de Rosetta déboulant un escalier.» Ensuite le personnage s'est étoffé quand on a travaillé le script, puis quand on s'est rendu sur les décors, un moment important pour nous pendant lequel on reprend l'écriture, on joue les scènes à deux, on cherche et on transforme beaucoup" On s'est dit qu'on n'avait jamais fait de film avec un personnage central féminin, on voulait essayer. On nous a dit qu'on n'y arriverait pas: «Vous ne pourrez jamais former un couple avec une comédienne parce que vous deux, vous êtes déjà un couple.» En trouvant l'actrice, puis en l'habillant, en la déshabillant, en transformant l'Emilie de la vie pour aller vers la Rosetta de fiction, on se l'est appropriée et on a commencé à être un peu moins inquiets. Mais c'est sûr qu'on avait peur. Non pas parce que nous sommes des hommes je ne pense pas qu'il existe un cinéma féministe, un cinéma masculin, ce genre de question ne nous est jamais vraiment apparue comme très intéressante, ni même fondée non, ce qui nous semblait difficile, c'est qu'on avait supprimé les intrigues. Dans la Promesse, il y a