New York de notre correspondant
L'air de rien, la femme s'est infiltrée dans les rangs de ceux qui viennent de passer la porte du Brooklyn Museum of Art. «N'y allez pas, je vous en prie, implore-t-elle, il faut dire aux gens que cette exposition représente la fin de la civilisation. Ils montrent des enfants avec des nez en forme de pénis là-dedans. Il n'y a plus aucun respect pour rien.» Dehors, le musée a des airs de Fort Alamo retranché derrière d'innombrables cordons policiers. Sur le trottoir, les membres de la paroisse Saint Michel ont les genoux à terre et en appellent à Dieu pour lutter contre la «décadence». Tout à côté, d'autres brandissent des pancartes qui demandent «de laisser l'art tranquille».
Affluence. S'il avait voulu lancer une campagne de publicité en faveur de l'exposition «Sensation», qui a ouvert samedi au Brooklyn Museum of Art, le maire de New York, Rudolph Giuliani, n'aurait pas pu mieux faire. En annonçant il y a dix jours qu'il allait couper les subventions au musée car il estimait que «l'argent du contribuable ne devait pas servir à financer un art qui rend malade», celui qui devrait bientôt annoncer sa candidature au Sénat a provoqué l'une des plus belles batailles politico-culturelles que la ville ait jamais connues. Surtout, il a fait de l'ouverture de l'exposition un événement, dans un New York qui apprécie toujours autant la controverse. Tout le week-end la file d'attente était impressionnante. «On n'avait jamais vu autant de monde ici», comme