Après seulement cinq jours d'exploitation, 126 373 entrées dans 101
salles de France. Rosetta est un succès. Vive elle! (Émilie Dequenne). Vive eux! (les frères Dardenne, Luc et Jean Pierre). Vive nous? Ça, c'est une autre paire de manches, publicitaire (voir page 45). Mais mis à part ce légitime bonheur, ce score remarquable a eu plusieurs vertus drolatiques. D'une part, déclencher un festival de retournements de vestes chez ceux là même qui hurlaient à la mort au lendemain de la palme cannoise mais qui ne poussent pas leur audace jusqu'à engueuler le succès. D'autre part, susciter un désappointement plus pervers chez tous ceux qui défendaient le film en espérant, à peiner secrètement, qu'il se ramasse ne serait-ce que pour alimenter leur petit commerce de défenseurs du cinéma d'auteur, donc, marginal, donc réservé, le cinéma d'art et décès. Pour tous ceux là, le succès de Rosetta fait donc office de coup de pieds aux ânes, prouvant qu'un film d'auteur à la hauteur, moderne, âpre, singulier et complexe (autant de qualités crachées comme des défauts à longueur des commentaires par les télés-journalistes dans les quelques jours qui précédèrent la sortie du film), peut rameuter un public nombreux. En précisant cependant que Rosetta n'aurait changé la vie que d'un seul spectateur qu'il serait déjà un énorme succès. Mais le succès de Rosetta n'est pas pour autant mérité. Le mérite n'a rien à voir avec le cinéma. C'est un vocable de comice agricole. Et si on se maintient dans cet