Bien avant que le spectacle ne démarre, les spectateurs sont pris
dans l'extravagant univers de Richard Foreman. Une musique entêtante et un enchevêtrement d'objets que l'on hésite à appeler décor. Des lampes, de toutes tailles, un gorille en peluche pendu par les pieds, des chérubins à tête de mort. Encombrements. Mais cet espace scénique fonctionne moins par ce qui s'y trouve que par l'impossibilité d'y circuler. Bientôt les personnages de Hôtel Fuck! déboulent. Pantins à la queue leu leu, pris de convulsions, comme écrasés par la bande son «I am happy, you're happy». Cette ritournelle les rend malades, comme s'ils se trouvaient sur un bateau pris dans une mer folle.
Pantalons à bretelles, chapeaux de groom, porte-jarretelles et plumes d'indiens, ils n'ont qu'une idée en tête: sauter dans le bus qui les conduira à Hôtel Fuck, où ils pourront enfin prendre leur pied. Evidemment tout s'y oppose. Sont-ils seulement embarqués dans la bonne histoire? Désespérés, ils se tirent des balles dans la tête et, comme dans les dessins animés, se relèvent pour repartir vers leur Eden. «Fuck», ils n'ont que ce mot à la bouche. Plus on en parle, moins on le fait, suggère Foreman.
Frustrations. Tel est bien le drame de ces petits humains effrayés par le moindre fantasme et complètement obsédés à force de frustrations. Costumé et perruqué XVIIIe, un personnage (le Marquis de Sade?) avance muni d'un immense pénis, juché sur d'étranges cothurnes, en réalité des caisses à cirer les pompes.
Pilie