Cinq ans ont passé et on n'est plus sûr d'aimer Extension du domaine
de la lutte comme au premier jour. Le souvenir de ce roman de Michel Houellebecq, dont l'effet miroir nous avait un temps absorbé, a été un peu pollué par le tintamarre médiatique qui succéda à la parution des Particules élémentaires. Trop d'interventions publiques à l'emporte-pièce et de paradoxes commodes proférés à tous vents par l'auteur ont mis à sac ce qui nous avait paru comme le journal méticuleux et tranchant des solitudes modernes. Cette adaptation au cinéma d'Extension ne permet pas d'y voir plus clair. Car Philippe Harel, son réalisateur, s'intéresse au moins autant au phénomène Houellebecq qu'à son oeuvre littéraire. Son désir de cinéaste, mais aussi d'acteur, puisqu'il interprète le premier rôle, se porte avant tout sur l'écrivain comme héraut médiatique. Harel ne semble même avoir fait le film que pour ça, pour se projeter en Houellebecq, tenir sa cigarette entre le majeur et l'annulaire, porter une mèche, proférer des maximes cinglantes d'une voix affectée et traînante.
Après s'être réfugié dans le contrechamp manquant de la la Femme défendue, Harel s'exhibe cette fois au centre de chaque plan, mais dans la peau d'un autre, entre transfert et autoportrait déguisé. Mais ses capacités très limitées d'acteur ne rendent pas l'exercice très passionnant. Les deux compères (Houellebecq a coécrit le scénario) se sont probablement marrés en fomentant cet échange de personnalité; mais ce petit trafic d'