Patrice Leconte pique un coup de gueule contre la critique et c'est la moindre des choses que de l'écouter. D'abord, parce que, à mi-chemin de son prochain film, il s'exprime à un moment où il n'a rien de particulier à vendre, sinon sa colère, et qu'il déclare d'ailleurs parler surtout au nom des autres. Mais aussi parce que la lettre qu'il a adressée à ses collègues de la société des Auteurs, réalisateurs, producteurs (ARP) pour leur demander de réfléchir en commun (lire ci-contre) intervient au terme d'une année tumultueuse, pour la critique comme pour le cinéma français. Une année qui a vu fuser les contentieux pourris et les vrais débats dans un mélange souvent malsain et dont la polémique autour du palmarès du dernier Festival de Cannes a été en quelque sorte le point d'orgue. Récapitulons.
Suicide. C'est sans doute le Figaro Magazine qui a tiré le premier avec la publication, au mois de février, d'une enquête intitulée «Le cinéma français jusqu'au bout de l'ennui», d'où il ressortait que l'addition de particularismes bien français (l'avance sur recettes + la Femis + la complaisance d'une critique intégriste) avait suicidé notre beau patrimoine cinématographique. Quelques mois plus tard, on eut la surprise de trouver, à l'autre bout, théoriquement, du spectre culturel et politique, une cover-story de la revue jeune et branchée Technikart disant peu ou prou la même chose et baptisée cette fois: «Pourquoi le cinéma français est nul?» On y trouvait égalemen