Pendant un peu moins d'un an, tout ce qu'on savait de Patrice aurait
pu s'écrire au dos d'un timbre-poste et c'était bien comme ça. Un disque nous est arrivé un jour de l'automne dernier sans la moindre rumeur pour l'accompagner et sans projet sérieux de commercialisation. Sur ce disque, il n'y avait pas grand-chose. Quatre chansons aux titres on ne peut plus concis: Lions, Love, Wonder et Million Miles. La première s'ouvrait timidement sur un froissement de guitare acoustique que venait aussitôt doubler le murmure d'un jeune homme à voix pointue. L'enregistrement semblait saisi sur le vif: une chambre, un magnéto, un soupçon d'écho.
Jeunesse. Patrice, sur le mode trompeur de l'aménité, y chantait un peu à la manière du Bob Marley de Redemption Song, dans un anglais bizarrement accentué et calqué sur les rythmes du patois jamaïcain, quelque chose qui disait à peu près: «D'abord, ils vont me traiter de bâtard/ et me dire d'aller me faire faire une coupe de cheveux décente/ mais il pourraient se mettre à trembler/ Ils vont apprendre que nous sommes des lions». C'est en tout cas ce qu'on comprenait. Cet envoûtant préambule prenait peu à peu un tour fiévreux. Sur un tapis de guitares sèches, on sentait naître la passion du chanteur, sa jeunesse se mesurait à la force des inspirations qu'il prenait entre les couplet comme s'il y a avait encore beaucoup à comprimer et tout à amortir.
Les autres compositions creusaient le même filon d'un reggae-blues plaintif où la guitare tissait si