Il existe deux manières d'appréhender Emiliana Torrini, nouvelle
venue sur la scène internationale. La première, lapidaire et simpliste, consisterait à la faire passer dans les pertes et profits avec une étiquette de «sous Björk FM». Ce dont l'ingénue se défend naturellement: «Etre aussi une chanteuse islandaise utilisant des éléments électroniques incite à ce type de rapprochement. Nous avons de toute façon une sorte de tronc commun, venant d'un tout petit pays qui a une forte tradition musicale, nimbée de beauté terrifiante.» La seconde attitude, plus conciliante et, souhaitons-le pour elle, plus juste, incitera à déceler en Emiliana Torrini, malgré une légère propension à la tendresse minaudière elle n'est, après tout, pas beaucoup plus âgée que Britney Spears , un certain potentiel qui pourrait s'affirmer au siècle prochain. Soul boréale. Pièces à conviction: un concert d'intronisation au délicieux opéra de Reykjavik où, épaulée par de bons musiciens, dont l'ex-batteur des Sugarcubes, elle s'acquitte honorablement d'un répertoire soulignant l'étendue de capacités vocales qui la situeraient dans une généalogie Edie Brickell-Tori Amos-Stina Nordestam et, donc, Björk. Et, surtout, Love in the Time of Science, un premier «véritable» album après quelques broutilles indigènes duquel sourd une mélancolie sophistiquée, à vrai dire moins grimaude qu'on l'aurait souhaité, pour cause d'implication intempestive (production, écriture, instruments, vocaux) du très moyennement