Quelque part en Bourgogne, à mi-chemin de la première étape de sa
première tournée française, Jude confie un faible pour les Chariots de feu. ça peut sembler bizarre mais ce drame de l'athlétisme exalté le fait pleurer à tous les coups. On découvre ainsi que le chanteur lettré de la côte Est fut un excellent coureur de demi-fond et qu'une de ses influences majeures était Steve Prefontaine, idole américaine de l'endurance qui disparut tragiquement au plus bel âge, en 1975, emporté par la vitesse de sa MG dorée.
Bouche à oreille. Jude, «lauréat» d'une nouvelle chanson folk-soul américaine, est parfaitement raccord avec ces années-là. Il semble aujourd'hui encore débarquer d'une de ces universités d'outre-Atlantique où l'athlétisme était un art: pantalon de toile au pli impeccable, gilet de laine rouge, écharpe et bottines de cuir verni, taille moyenne, menton carré, cheveu noir et dru au joli cran de jeune premier fitzgeraldien.
On lui trouve aussi une certaine ressemblance avec Sebastian Coe, héros courtois et flamboyant du 1 500 m anglais, et ça n'est pas sans rapport avec son activité de musicien. Le demi-fond est affaire d'élégance, de perfectionnisme, de passion et de grâce et Jude, quand il courait, ne pensait qu'à une chose: «gagner.» C'est encore vrai et ça ne va pas toujours sans contrariété.
Mardi, dès son arrivée à Paris, des fans l'attendaient fiévreusement aux portes d'une radio et se pâmaient au moindre murmure de sa voix délicieuse. Samedi soir, son concert de l'Ely