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Libération

Expo. Le travail sur l'image d'une artiste new-yorkaise d'origine islandaise. Roni Horn, au-delà du cercle arctique. Roni Horn. Musée d'Art moderne de la ville de Paris, 11, avenue du Président-Wilson, Paris XVIe. Tél.: 01 53 67 40 00. Jusqu'au 23 janvier.

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publié le 15 décembre 1999 à 2h00

Toujours regarder à deux fois les artistes qui doublent leurs

représentations: Henri Matisse n'a-t-il pas fait deux versions de son Jeune Marin (1 et 2), son fameux Luxe (1 et 2), ou sa célèbre Danse, l'une au MoMA de New York, l'autre conservée à Saint-Pétersbourg et exposée en ce moment à Paris dans l'exposition le Fauvisme? Justement: exactement au-dessus de l'exposition fauve au musée d'Art moderne de la Ville de Paris, l'artiste américaine Roni Horn expose deux fois la photo d'une chouette empaillée. La même photo côte à côte, constituant une paire d'images semblables. Quatre yeux vous contemplent, billes de verre fichées dans l'épaisseur neigeuse et vaporeuse d'un plumage blanc sur fond blanc: une image splendide mais terrifiante d'une nature morte animale. Le sublime, chez Roni Horn, c'est-à-dire ce mélange de terreur et de fascination pour l'image, est ainsi complètement désidéalisé: qui dit «idéal», en effet, parle d'une vision unique, ultime, irreproductible. La vision monoculaire, centrée et centrale, qui constitue l'histoire de la peinture et des images depuis la Renaissance (et jusqu'au fauvisme) est ici à nouveau défiée par la duplication de l'image. L'image deux demande une attention d'autant plus soutenue que le regard court de l'une à l'autre sans jamais les rattraper, et que se constitue alors un triangle entre le diptyque et le spectateur où personne ni rien n'occupe une position centrale.

Minimalisme affectif. Soutenir l'attention, défier les conventions