«J'aurais mieux fait/De continuer/A me contenter/De mes amis/ D'une
seule nuit/C'est sans façons/ Mais c'est plus sûr/Tant pis pour l'amour/On souffre moins/Ne pas aimer/ C'est aussi ne jamais/Pleurer d'amour"», scande attendrie la chantante Lily, grosse chatte des gouttières qui retient ses larmes face à trois autres chattes hilares, ses compagnes du trottoir, qui l'avaient prévenue. Un chat de la haute" c'était risqué. Il est parti, a disparu, l'a plaquée, son Brisquet. Pourtant, «lui, c'était autre chose», se souvient Lily: il n'était pas du genre matou a faire machinalement des mamours, à renforts de sardines: «Lui, c'était du verbe.»
Grâce. Les chattes de joie sont rigolotes, qui aux rupins peuvent préférer les poètes. Et si lesdits poètes s'avèrent de surcroît un brin rupins à leurs yeux, elles croient rêver. Pauvre Lily-péripatéticienne, son Brisquet s'est volatilisé parce que, justement, une autre qu'elle, moins massive, plus fraîche et qui s'appelle Minette, est tombée sous le charme du volage. Elle a quitté son pauvre grenier, a laissé derrière elle sa mère, l'accorte et délirante Madame Léon, une lucide celle-là; elle a largué du même élan sur les toits d'ardoise sa soeur Bébé, fiancée à un gardien de la paix au doux nom de Fanfounet, et aux grandes oreilles tombantes de caniche en uniforme: un brave.
Il y a vingt-deux ans, lorsque le surprenant metteur en scène Alfredo Arias adapta la nouvelle de Balzac Peines de coeur d'une chatte anglaise, l'héroïne féline avait