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Libération
Interview

«Ressources humaines» vu de l'usine.Pour Christian Corrouge, ouvrier chez Peugeot, le film sonne globalement juste.

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publié le 14 janvier 2000 à 21h58

Christian Corrouge, 48 ans, est ouvrier à l'usine Peugeot de Sochaux

depuis 31 ans. Malgré son statut de professionnel, il est toujours OS, à la carrosserie, à l'atelier de retouche. Il est l'un des protagonistes du livre Retour sur la condition ouvrière (1).

Les bruits, l'univers de l'usine, l'environnement sont bien reproduits dans le film. Par contre, les chefs d'équipe sont un peu trop agressifs. Mais peut-être que dans les petites tôles, c'est comme ça. Dans les grosses boîtes comme Peugeot, ce ne serait pas possible. Ils ont trop peur du rapport de force. Chez nous, je vois mal comment un gosse de prolo pourrait finir DRH avec le flicage qu'il y a. Je n'ai jamais connu un gosse d'OS qui finisse cadre dans l'usine où travaille son père; au mieux, il finit technicien ou agent de maîtrise.

Fragile. Dans le film, le cadre paraît un peu déphasé, il a des goûts de chiotte vestimentaires, un costume trois-pièces. Ça fait longtemps qu'ils ne sont plus habillés comme ça. En tout cas, plus chez nous. L'attitude du jeune qui arrive est bien représentée. Ses hésitations sont bien vues. Son manque de vocabulaire aussi. Au début, il est à l'étroit dans son costume, il n'a pas encore la «tchatche» des cadres, jeunes et dynamiques.

Le moment le plus fort du film est l'altercation entre le fils et son père; quand le jeune lui dit: «en fait j'ai vécu dans la honte, t'avais honte d'être ouvrier et tu m'as communiqué ta honte, maintenant tu continues encore à me faire honte». Mon père à moi