A la sempiternelle question: «Pourquoi écrire?», Alphonse Boudard,
qui n'était pas du genre à louvoyer, avait une réponse toute prête: «Pour narguer les cimetières.» Ces mêmes cimetières qui, depuis sa prise du maquis en 1943 et sa contribution à la libération de Paris dans les rangs des FFI, jusqu'à cette tuberculose contractée durant ses premières année de détention à Fresnes, entre 1948 et 1950, examinaient son cas avec grand intérêt.
Devenu voyou tubard à un moment où l'antibiotique est encore une rareté, le destin «cayattien» de l'ancien héros (il fut décoré de la croix de guerre à 19 ans) semble en effet tout tracé. Rien que de très naturel au fond dans l'itinéraire de cet enfant naturel, né le 17 décembre 1925 rue de la Convention et élevé jusqu'à l'âge de 7 ans chez des paysans du Loiret; avant de rejoindre sa grand-mère dans le XIIIe arrondissement. Endroit auquel il conservera toute sa tendresse: «C'est mon quartier, mon secteur dans la grande fourmilière parisienne. Les touristes n'y viennent jamais. Leurs caméras y glaneraient quoi? La petite place provinciale des Peupliers? Notre-Dame-de-la-Gare? La rue du Château-des-Rentiers? Peut-être la manufacture des Gobelins? Ils n'y font qu'entrer et sortir, vite on les rebombe dans l'autocar, qu'ils restent propres, les Anglo-Saxons, pour voir ensuite le tombeau de l'Empereur et les néons de la rue Pigalle.»
Pied-Nickelé. Bien plus que «gangster», comme on dit à l'époque, Alphonse Boudard est en fait un Pied-Nickelé. Un