Au premier contact, D’Angelo, respectueusement surnommé «D» dans les cercles de la musique noire américaine, n’a rien d’une figure charismatique: il se rétracte souvent quand on lui parle, tête baissée, s’exprime avec un accent traînant de Virginien, dans un patois intime dur à décrypter. Son look «country» ne varie pas, jean flottant et tee-shirt serré sur une musculature soignée de mi-lourd, il paraît sur scène plus timide qu’intimidant. Son impact sur l’époque n’en est pas moins impressionnant.
Révolutionnaire
En cinq ans, on a déjà présenté D’Angelo comme l’inspirateur de deux révolutions musicales. A l’automne 1995, quand sortait son premier album Brown Sugar et que les New-Yorkais en venaient littéralement aux mains pour assister à son premier show, il était promu leader d’un mouvement «néo-soul» (nu soul). Cette semaine, alors que paraît son deuxième album, Voodoo, annoncé et repoussé près de vingt fois en plus d’un an, le voilà, selon le New York Times, à la pointe du renouveau «black pop».
Aujourd’hui comme en 1995, sa musique s’affranchit des formats en vogue, au point de donner des cauchemars aux producteurs qui l’ont laissé chercher sa voie en studio pendant près de trois ans. Pour les radios, les morceaux sont trop longs (six à sept minutes en moyenne); trop lents et flottants, leurs contours jazzy-blues diffus vont à l’encontre des standards calibrés du rhythm’n blues actuel qui recycle en boucle les dernières tendances de la musique électronique.
Sous ses airs de n