Les musiques de Turquie vivent une révolution, et la diversité du
programme proposé cette semaine par la Cité de la musique à Paris illustre cette tendance. Qui aurait imaginé, il y a quelques années, voir se produire côte à côte un orchestre de chant tzigane, une chanteuse kurde, un quartette de chant d'Istanbul et un ensemble de musique ottomane? Mustafa Kemal, dit Atatürk, doit s'en retourner dans sa tombe, lui qui avait décrété: «La musique turque sera nationale et tournée vers l'Europe ou ne sera pas.» Depuis 1923 et l'avènement du leader laïque, ses fidèles avaient bouleversé le terroir musical du pays: troupes de la mer Noire obligées de chanter des airs anatoliens et vice versa, grandes vedettes ignorées, folklores vidés de leurs langues (kurde, arménien, arabe"), particularismes musicaux gommés.
Reste aujourd'hui à distinguer ceux qui ont oeuvré depuis des années pour sortir de l'anonymat les artistes et musiques oubliés du pays et, par extension, des anciennes Républiques soviétiques voisines. Et ceux qui, à la faveur des changements actuels en Turquie, investissent dans le créneau de la redécouverte: radio nationale, conservatoires et institutions financières n'a-t-on pas vu une banque éditer un coffret de musique ottomane?
Cette révolution musicale ne s'est pas décidée dans les conservatoires turcs, mais dans un immeuble au bord du Bosphore. Un endroit unique au monde. Imaginez un bâtiment à Paris où se côtoieraient les bureaux de Virgin, d'Universal, de Naïve, de