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Libération

Screamin' et châtiment. Le créateur fantasque de «I Put A Spell On You» est mort samedi à 70 ans. (Screamin'Jay Hawkins)

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publié le 14 février 2000 à 22h13

Comme Fred McNeil (pour Everybody's Talking) ou Percy Sledge (pour

When A Man Loves A Woman), Screamin'Jay Hawkins restera aux yeux du grand public ce que les Américains appellent: «A one guy song». L'homme d'une seule chanson. En l'occurrence I Put A Spell On You, gravée en 1956, pour le compte du label Okeh, à la tête d'une poignée de musiciens (The Leroy Kirkland Orchestra) passablement imbibés.

Réduire la carrière du baryton de Cleveland, Ohio, à cette unique composition, même reprise par quantité d'admirateurs (mention spéciale à Nina Simone, au Alan Price Set, à Creedence Clearwater Revival), est à la fois flatteur et injuste. Flatteur, parce que, eu égard au retentissement planétaire de I Put A Spell On You («je te jette un sort»), cela équivaut, pour son créateur, à une presque canonisation. Injuste, parce l'oeuvre de Screamin'Jay Hawkins est considérable, alors que sa vie captivante, comme celle de tout blueseux qui se respecte, aurait pu faire l'objet d'un feuilleton de Michel Zevaco revu par Chester Himes.

Boxeur amateur. Orphelin élevé par une famille amérindienne (Blackfoot), pianiste autodidacte à six ans, boxeur amateur à quatorze, GI à seize (capturé dans le Pacifique, il sera torturé par les Japonais), champion d'Alaska catégorie poids moyens à vingt, Jalacy Hawkins, las de recevoir des gnons, s'est résolu, à partir de 1950, à taper sur les seuls claviers, au service de quelques colosses du saxophone jazzy tels Gene Ammons, Arnett Cobb, James Moody ou Illinois