Avec la Fausse Suivante, tube inusable de Marivaux, lui-même mythe incoulable du théâtre français à son glorieux meilleur, il n’était pas question pour Benoît Jacquot de faire le malin. Une telle mécanique, on n’y touche pas. Une si parfaite horlogerie de la cruauté, sans la moindre graisse ni la moindre seconde perdue, on la prend comme elle est et on dit merci.
Ce texte, en effet, est un cadeau: une partie de billard à quatre bandes où un chevalier, une comtesse, un valet et un jeune intrigant se jouent les uns des autres et, en dernier ressort, de nous. Pour le mettre en boîte, Jacquot a pris ce chef-d'oeuvre au mot de sa vitesse, foudroyante. Il l'a tourné là, comme ça, vite et bien, en quelques jours, sur-le-champ et sur le vif, frais et impromptu. Il ne reconstitue surtout pas la pièce dans un cadre cinématographique; il occupe un théâtre, jusque dans ses moindres recoins, escaliers de service et extincteurs inclus, travées et coulisses comprises.
Quel peut être, alors, l'intérêt d'un film qui ne serait que la version filmée d'une représentation? D'abord, la vérification de ce vieux paradoxe: le bon théâtre est ce qui va le mieux au cinéma, de Guitry aux Straub, les exemples illustres abondent. Ensuite, l'éventuelle phobie du théâtre, commune à bien des cinéphiles, trouve là confort et réconfort: si l'on ne s'estime pas capable d'être enfermé douze heures devant une représentation live du Soulier de satin, il y a toujours la version qu'en a tirée Oliveira. Mais, plus sé