Elle et lui au 14e étage, c'est son film à elle. Un film écrit par
elle, habité par elle, débraillé par elle, névrosé par elle" Et elle, c'est Sophie Blondy. La trentaine toute blonde, comédienne chez Akerman, Nuytten ou Zulawski et réalisatrice de documentaires sur l'enfance, le travail et les éboueurs, etc. A Amiens, un peu larguée et un peu lasse, entre une chanson de Nico et un concert de Dick Annegarn, Sophie se prend à rêver de Sue, celle qui s'est perdue à Manhattan. Amiens n'est pas New York (ça se saurait), mais comme la ville est filmée dans un noir et blanc jarmuschien, il n'est pas interdit de croire à l'effet d'aliénation du chef-lieu de la Somme sur les éternelles petites filles blondes qui attendent encore devant leur coiffeuse l'arrivée du prince charmant. Lui, par exemple? Non, lui, c'est Rémi, son mec, un brun lugubre qui porte sur ses épaules vingt ans d'utopie en atelier théâtre à l'UFR d'Amiens-III" Le prince, ce pourrait être, dans l'idéal, Guillaume Depardieu, théâtreux en battle-dress prêt à bouffer la scène nationale pour imposer, oui ou merde, des mises en scène de feu. Ou Michel, le voisin musicos keu-bla supersympa. Bref, tout cela sent fort le bonheur alternatif postbaba, le cinéma d'auteur des années 80 le plus délavé, l'ennui provincial. Comme toute sincérité, celle de Sophie Blondy est souvent gênante. Mais il serait rustre de refuser en bloc une personnalité aussi bordélique. Plus fragile que réellement exaspérant, le portrait dérangé qu'elle