«Voy subiendo" Voy bajando"» La clameur est perceptible bien avant
d'arriver au stade Hiram-Bithorn, le temple de base-ball de San-Juan, la capitale de Porto Rico. Le 1er mai 1999, Plena Libre ouvrait l'hommage au défunt chanteur Hector Lavoe, qui rassemblait quelques monstres sacrés de la salsa de l'île (Willie Colon, la Sonora Ponceña"). L'engrenage rythmique que produisent les huit percussionnistes, la section de trombones et le couple piano-basse sont d'une efficacité contagieuse. Sur la pelouse et dans les gradins, le refrain est repris en choeur par des milliers d'amateurs, mais aussi mimé par des groupes de danseurs à la chorégraphie parfaitement réglée. Gary Nuñez, le leader du groupe, savoure sa victoire: la plena, un rythme traditionnel longtemps relégué au rang de curiosité folklorique, a retrouvé droit de cité auprès de ses compatriotes. Son groupe, créé en 1994, donne de son propre aveu «environ deux cents concerts par an».
Bidonvilles. A l'instar du tango à Buenos Aires, la plena est née à la fin du XIXe siècle dans un faubourg prolétaire, entre tavernes et maisons closes. Après l'abolition de l'esclavage et son passage sous domination nord-américaine en 1898, Porto Rico doit adapter son économie de plantations au modèle industriel. Sur la côte sud, Ponce devient le port d'entrée d'une main-d'oeuvre en provenance principalement des Antilles anglophones. Dans le bidonville de La Joya del Castillo cohabitent les traditions musicales des nouveaux venus et celles des