Buenos Aires, de notre correspondante.
Dans le paisible quartier de Floresta, le bâtiment grisâtre aux vitres cassées est couvert de dessins, de noms de groupes de rock. Un seul graffiti accuse: «Videla, assassin». La moitié de ces locaux désaffectés est toujours propriété de la police, l'un des hangars fonctionne aujourd'hui comme centre de contrôle de véhicules. En 1978, c'était l'Olimpo, l'un des sinistres décors des années les plus noires de l'Argentine.
30 000 «disparus». Dans les années 70, le pays a connu une montée sans précédent des mouvements de gauche. Le 24 mars 1976, le coup d'Etat du général Jorge Videla marque le début de ce que les militaires nomment le «processus de réorganisation nationale». Au prétexte de mettre fin aux actions des groupes armés et d'«anéantir la subversion», l'armée, secondée par la police, déclenche la plus sanglante répression jamais subie par la population civile argentine. Syndicalistes, militants politiques, éducateurs, intellectuels, étudiants, lycéens, ainsi que leurs familles, sont traqués, enlevés de nuit chez eux, parfois sur leurs lieux de travail, puis séquestrés. Commissariats, casernes, mais aussi écoles militaires et locaux publics sont transformés en centres de torture plus de 350 dans tout le pays qui scellent le destin de 30 000 «disparus», selon le bilan des organismes de droits de l'homme. Au retour de la démocratie, le témoignage d'une poignée de survivants révèle le plan macabre du terrorisme d'Etat.
«Pendant trois