Première particulièrement attendue de la nouvelle production des
Contes d'Hoffmann lundi soir. Il faut faire oublier le Chéreau 74 du Palais-Garnier et consoler de Polanski à Bastille au début des années 90. James Conlon dirige un Orchestre de l'Opéra de Paris plein de vitalité. La Muse s'approche dans une trouée de lumière poudreuse du poète gisant dans ses bouteilles. On est dans la taverne de Luther, mitoyenne d'un théâtre où l'on donne Don Giovanni.
Robert Carsen saura-t-il rendre justice à Offenbach, «l'un des plus grands créateurs satiriques de tous les temps et de toutes les cultures», dixit Karl Kraus? Le Canadien démultiplie les niveaux de sens avec une habileté élégante, dès la première citation de Don Giovanni. Comme le paquebot d'Amarcord, un plateau illuminé coulisse latéralement. Mais cette saynète de poupées dans une boîte à chaussures géante est reconduite hors champ pour laisser la vie reprendre le dessus sur l'art et poser une première question: et si le monde réel n'était qu'une valse de pantins, et la taverne, monde des pulsions, le théâtre de la vraie vie? Banalisés par l'usage, les procédés de distanciation modernes éclairages sur tringles apparentes, action sur l'envers du décor" retrouvent leur pertinence dans ce dispositif dramaturgique fidèle au Freud de Das Unheimlichkeit (l'Inquiétante étrangeté), commentant Hoffmann, autant qu'au Nietzsche de Zarathoustra, pour qui, sans l'ivresse dionysiaque, pas d'art ni transmutation des valeurs.
Romantisme