Deauville, de notre envoyé spécial.
Shabana Azmi n'a pas sa langue dans sa poche. Activiste engagée, de gauche, membre du Parlement indien depuis presque trois ans, grande gueule internationale, casse-pieds à ses heures, généreuse, volontaire, casse-cou de nature, provocatrice, sensuelle, musulmane, narcissique, joyeuse, femme d'un poète à l'humour pince-sans-rire (Javed Akhtar, aussi scénariste et parolier), fille du grand poète ourdou Kaifi Azmi, élégante, toujours belle, crâne rasé (à cause du prochain film de Deepa Mehta dans laquelle elle interprète une veuve des années 30), porte-parole de la paix pour l'ONU, bagarreuse impitoyable, couronnée cinq fois du prix national de la meilleure actrice, attentionnée, sans enfants, ayant connu, aimé, collaboré depuis vingt-cinq ans avec les plus grands noms du cinéma indien (Satyajit Ray, Shyam Benegal, Mrinal Sen, Govind Nihalani"), toujours optimiste, charismatique, fière d'être indienne et finalement incomparable actrice dans le firmament du cinéma d'auteur, Shabana Azmi ne parle jamais aussi bien d'elle et de sa carrière que lorsqu'elle parle de" politique et de laïcité en pays hindou.
Tout est politique. A un groupe d'étudiants de l'Institut des langues orientales venu la rencontrer, elle glisse entre deux commentaires sur son dernier film: «Vous savez, la démocratie, c'est la négociation des espaces par les minorités.» Ou encore: «Tant que les femmes ne seront pas au front de la question du développement, aucun paradigme