Il fut un temps où la beauté était intrinsèque à la machine. Le
redéploiement de trois mille objets de l'histoire des sciences et techniques dans le musée des Arts et Métiers à Paris souligne cette funeste césure, qu'on pourrait situer en 1950. Auparavant, les objets étaient aventureux et beaux. A l'époque contemporaine, ils sont efficaces et moches. Le décor du musée, installé dans des édifices stratifiés depuis le XIIIe siècle, ne dit pas autre chose: l'élégance courbe des rails posés au XIXe dans les planchers contraste avec la lourde linéarité du rail de ventilation et lumière en laiton marron qui court au milieu des plafonds. Sinon, la découpe muséographique est simple (instruments scientifiques, matériaux, construction, énergie, mécanique, transports, communication, chaque secteur étant subdivisé en périodes historiques), les salles vastes et claires. Les espaces encombrés d'un fatras de machines ont été libérés, grâce au déménagement de 80 000 objets et documents vers des réserves édifiées à La Plaine-Saint-Denis; dans ce domaine, ce fonds est le plus riche au monde. Après huit ans de fermeture et plus de 360 millions de francs de travaux, renaît ainsi le musée que voulait l'abbé révolutionnaire Henri Grégoire, quand il a obtenu en 1794 la création d'un conservatoire des arts et des métiers pour servir de «dépôt de machines neuves et utiles».
Un des «grands travaux». Trimballé quatre ans dans des locaux précaires, le conservatoire a ensuite été installé dans un ancien p