Ils sont tous là. Dieudonné, le cantonnier, au cornet à pistons;

Gauvin, l'ébéniste, au saxo; Moineau à la contrebasse à vent; la grande fille Bleuse à la flûte; Righetti à la grosse caisse; Thévenet et ses 135 kg à la baguette. Et tutti quanti, jusqu'à Jean-Pierre Bodin qui ressuscite devant nous les riches heures de l'harmonie municipale de son enfance, où il a sévi comme saxo alto. Celle de Chauvigny, près de Poitiers, moins calamiteuse qu'avinée, quand elle se donnait du coeur à l'ouvrage pour assurer la Marseillaise ou la sonnerie aux morts tous les 14 juillet ou 11 novembre.

Photo de famille. Au théâtre de l'Européen, le conteur préside ainsi à un banquet dionysiaque: celui de la sainte Cécile, patronne des musiciens. Tout juste séparé du public par une table nappée de blanc, Jean-Pierre Bodin offre à boire dans tous les sens du terme. Au nectar bien frappé qu'il sert à tous en narrant les riches heures de l'harmonie de Chauvigny, l'échanson joint le geste à la parole en offrant un canon de rouge aux premiers rangs (avant la tournée générale en fin de spectacle). Le meilleur cru est évidemment celui vendangé dans les souvenirs adolescents du conteur, tant ses personnages à la Dubout sont nos cousins à la mode de Bretagne. Naguère régisseur de théâtre, Jean-Pierre Bodin doit d'ailleurs son statut de conteur atypique à l'insistance de ses amis, jamais lassés de ses intarissables anecdotes.

Créé à Avignon en juillet 1994, le Banquet de la Sainte-Cécile (écrit avec le coméd