Peu de chanteurs français envisagent à ce point la chanson comme un
mode particulier d'autofiction. Le sujet d'un album d'Etienne Daho est avant tout l'état conjecturel du sujet Daho saisi à un moment particulier de son existence, parfois euphorique et solaire (Paris ailleurs), parfois chagriné et tout gercé à l'intérieur (Eden). Corps et Armes est donc un nouveau chapitre à ce journal intime, entamé en 1981 avec l'indémodable Mythomane. Durant l'élaboration de ce chantier 2000, Daho est tombé amoureux; le disque est ainsi quasiment un concept-album sur les phases contradictoires et successives d'une histoire d'amour. Il s'ouvre en tout état de cause par la première rencontre avec l'être aimé, intitulée Ouverture, crescendo de cordes à la Craig Armstrong tout à la gloire de l'éblouissement amoureux, et dont le déjà culte «Et plus tu t'ouvres à moi, et plus je m'aperçois, que lentement je m'ouvre» s'entend comme la possible apologie d'une sexualité autoreverse décomplexée.
Par la suite, tout y passe: la difficulté à se défaire des habitudes de célibat (l'Année du dragon), les brouilles pour rire (Rendez-vous à Vedra), la reconduction des mêmes scénarios d'une histoire à l'autre (les Mauvais choix). A la chanson de rupture (la Baie) succède immédiatement la célébration des retrouvailles (la Mémoire vive), avant que l'album ne s'achève sur un rêve de fusion totale et extatique (San Antonia de luna et son «Je découvre l'été, l'été sans fin.»). L'auteur découpe avec toujours autant