Abordant le cas de l'activiste viennois Otto Mühl, Régis Michel,
commissaire de l'exposition Posséder et Détruire (1), a eu la riche idée de ressortir sur un des pans du Louvre cette phrase d'Althusser: «La famille est politique.» On ne pouvait rêver axiome aussi limpide et dévastateur pour comprendre l'Autriche d'aujourd'hui, celle qui vit sous un gouvernement de coalition dans lequel siège le FPö du néonazi Jörg Haider, une société amnésique des crimes de ses pères, une famille reposant sur une omerta empêchant tout travail de deuil, faillite bâtie sur des réflexes révisionnistes allant jusqu'à nier les actes de la Wehrmacht ou, pire, amenant ses fils à les afficher fièrement.
Une ruine fasciste contre laquelle semblent seuls se manifester les artistes, Elfriede Jelinek en tête. Il importe donc, pour comprendre un processus qui s'annonçait comme inéluctable, de voir A l'est de la guerre, exorcisme sous forme de documentaire que proposait l'écrivain et cinéaste viennoise Ruth Beckermann en 1997 (diffusé il y a quelques temps déjà sur Arte). Barbarie banalisée. Profitant d'une exposition tenue en novembre 1995 à l'ancienne Laiterie centrale de Vienne sur les crimes de la Wehrmacht sur le front oriental et en Yougoslavie (expo, comme par hasard, contestée par la droite autrichienne), Ruth Beckermann tentait d'y comprendre la banalisation de la barbarie et d'abattre le mur de l'oubli en interrogeant des visiteurs susceptibles, au vu de leur âge, d'avoir eu en tant que soldats d