D'entrée, la définition du sujet pose problème: après la projection
en ciné-concert (sur une musique de Pierre Jodlowski) de la Grève de Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein, réalisé en 1924 (l'année de la mort de Lénine), certains participants du colloque sur le cinéma stalinien, organisé jeudi et vendredi derniers par la cinémathèque de Toulouse et l'université du Mirail, avouent leur perplexité. Peut-on qualifier de stalinien ce film léniniste? De même, l'historien du cinéma François Albera se demandera si le Bonheur d'Alexandre Medvedkine, les Kino Pravda de Vertov sont des films staliniens? Et s'il existe vraiment une esthétique stalinienne? Est-ce le réalisme socialiste? Quelles dates prendre comme bornes? 1924-1953? 1927-1956? Au bout du colloque, il n'y aura toujours pas de consensus sur ces questions.
Auparavant, on aura vu quelques images étonnantes. Comme le Serment de Mikhaïl Tchiaourelli (le film «le plus staliniste de l'histoire», dit le programme), où Joseph Djougachvili est traité en héros infaillible, capable même de réparer un tracteur en panne sur la place Rouge. On aura entendu Valeri Bossenko, du Gosfilmfondkino, parler d'Une romance sentimentale, vingt minutes qu'Eisenstein a coréalisées avec Gregory Alexandrov à Paris en 1930. Pour le chercheur, ce film produit par des Russes blancs préfigure le réalisme socialiste.
«Romance"» et théories. Il commence par une scène de tempête de type documentaire et moderniste, avec prises de vues vertigineuses et calligraphi