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Libération
Critique

L'art moderne a une bonne Tate.

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A Londres, la nouvelle Tate Modern éblouit.
publié le 12 mai 2000 à 0h26

Une fois franchi le seuil du bâtiment, presque rébarbatif avec son revêtement de briques jaunâtres, la gifle est immédiate. Plutôt la paire de baffes: offerte en même temps par la vision du «hall des turbines» de la Tate Modern, gigantesque espace évoquant une sorte d'épilogue heureux d'un film de Terry Gilliam, tout autant que par la vue de l'araignée de Louise Bourgeois. Son insecte-sculpture aux pédoncules de bronze est juché sur une terrasse, piqûre d'ironie greffée sur l'ordre ambiant. On en a le souffle coupé, pour longtemps.

Un signe. La nouvelle Tate Modern (inaugurée hier par la reine) laisse pantois, ébloui, avec des préjugés jetés aux orties. Et un peu envieux, aussi: car Londres, qui en était dépourvue, possède désormais ce magnifique musée d'art moderne. Pas seulement un musée avec des oeuvres d'art, mais aussi un signe, catalyseur pour Londres. Un signe qui redéploie la ville, sa géographie, sa topographie, au moment où Ken Livingstone le «gauchiste» accède à la fonction de premier maire. Mais la Tate Modern est, avant tout, le signe qui rend fréquentable, intéressant, voire jubilatoire, l'art du XXe siècle et de notre temps. Rien moins que 134,5 millions de livres (1,5 milliard de francs), dont 56 de la loterie nationale et 50 du fonds de l'an 2000, entre autres deniers publics et privés, sans compter les 6 millions de livres annuels du gouvernement (juste pour assurer la gratuité), ont été mis à contribution pour faire de la Tate l'acteur prin